J'ai l'impression de devenir un rien peu crédible, à force de n'écrire que des récits si enthousiastes, mais les lieux que je visite au Kérala sont tous tellement beaux et agréable que c'est la force des choses. Les habitants du Kérala (qui veut d'ailleurs dire en Malayalam « pays des cocotiers ») sont fiers de la beauté de leur État avec raison.
Je quitte la tranquillité et la fraîcheur relative de la montagne à Munnar pour retrouver la côte à Kochi. La ville est plus connue chez nous sous son nom européen, Cochin. Kochi, le nom indien, qualifie en faîte l'agglomération de plus d'un million et demi d'habitants, la plus peuplée du Kérala. Elle s'étend autour d'une baie, sur des îles et des péninsules et est l'un des ports les plus importants de l'Inde. En tant que touriste, on se dirige directement vers le quartier historique de Fort Cochin, situé à l'extrémité d'une péninsule faisant face au continent. Étant assez excentré, la vielle ville au passé colonial est très bien préservée et agréablement tranquille, surtout maintenant, en basse saison. Les innombrables hôtels, pensions, restaurants et rickshaws témoignent du nombre très important de touristes qui doivent la visiter quand la saison touristique bat son plein, en décembre et janvier.
En ce moment, par contre, on trouve de bons hébergement à très on prix. Je loge dans le quartier catholique Fort Nagar, à proximité de la cathédrale et suis témoin d'une procession près-pasquale faisant le chemin de croix en 14 stations entre les habitations du voisinage. Qui plus est, les chauffeurs de rickshaws rivalisent pour attirer la clientèle entre les quelques touristes présent. C'est ainsi que l'on peut se payer une demi-journée de visite guidée à très bas prix si on est prêt à visiter quelques emporiums, ces magasins de souvenir offrant artisanat local, textiles et autres tapis que l'on trouve dans toutes les villes touristique indiennes. En effet, les chauffeurs de rickshaws touchent une provision pour chaque touriste qu'ils y amènent. À Fort Cochin, cela se passe par le billet d'un système de bonus. Ainsi, grâce à moi, mon chauffeur du jour obtiendra un nouvel uniforme ainsi que le remboursement de ses frais d'essence pour la journée. Je n'ai d'ailleurs pas regretté, car mon chauffeur s'est avéré un très bon et sympathique guide, qui m'a amené à pas mal de lieux que mon Lonely Planet ne mentionnait pas. Ainsi, à part la synagogue, très belle avec un carrelage en porcelaine chinois, un tabernacle en or et des lustres de verre belge et le palais construit par les néerlandais pour le raja, je visites des comptoirs d'épices et ayurvédiques, un palais jaïn et le lavoir. C'est sans doute ici qu'aura été lavé mon linge deux jours plus tard. Le tout est également repassé, même mes caleçons, quel dommage de les bourrer ensuite dans mon sac à dos.
Le lendemain, je prend le ferry pour Ernakulam, le centre ville moderne et agité sur le continent. Avec sa promenade au bord de l'eau propre et moderne ainsi que ses immeubles haut de gamme avec vue sur le port, la ville paraît à première vue presque occidentale. Par contre, derrière cette façade, on retrouve l'agitation et le brouhaha caractéristique des quartiers commerçants des grandes villes indiennes. Le soir, je m'offre une représentation de kathakali. Cette forme de théatre traditionnelle kéralaise était à l'origine représentée lors des fêtes religieuses dans les temples. Elle a pour thème, comment pourrait-ce en être autrement, les histoires du mahabharata, ce récit épique national du sous-continent mettant en scène héros et déités hindoues. Le kathakali vit essentiellement du maquillage très élaboré des acteurs ainsi que de leurs mimiques impressionnantes. On ne se parle pas sur scène, les caractères communiquent par un langage de signes particulier. À l'origine, une représentation dure 6 à 8 heures, mais aujourd'hui, il y a des représentations plus courtes pour les touristes. Celle que je vais voir inclut de bonnes explications pour comprendre ce qui va se passer sur scène. Je ne peux que recommander d'aller voir une représentation si on passe dans la région.
Je termine mon séjour à Kochi par une journée de détente à Cherai Beach, non loin de là sur Vypeen Island. La plage n'a rien de particulier, mais on peut bien se baigner dans les eaux tranquilles et chaudes, presque trop chaudes. En fin d'après midi, sur la rive de Vypeen Island faisant face à Fort Cochin, je savoure la vue sur les fameux filets de pêche chinois qui donnent un charme particulier au vieux port de pêche. D'ici, on peu également très bien observer les dauphins qui sont nombreux dans les eaux du port. Ça fait beaucoup de bien d'être ici, j'ai donc fait beaucoup de
photos.
Mon passage au Kérala coïncide d'ailleurs avec les élections qui ont lieu pour renouveler le parlement de l'État. On ne peu pas faire autrement que de remarquer la campagne électorale qui est passionnante. L'enjeu des élections est la reconduction du gouvernement de gauche de l'alliance LDF (Left Democratic Front, dont la principale composante est le parti communiste indien (marxiste) CPI(M)). L'alternative serait l'alliance UDF (United Democratic Front), menée par le parti du congrès. Les Kéralais sont fier d'être le premier état au monde à avoir eu un gouvernement communiste élu démocratiquement en 1957. Depuis, les communistes et le congrès alternent au gouvernement de l'État. Les thèmes principaux de la campagne sont l'augmentation des prix pour les denrées alimentaires et l'essence ainsi que la corruption. En effet, ces derniers mois, plusieurs gros scandales de corruptions ont agité la vie politique indienne au niveau national. La campagne a lieu à un niveau très local, avec de petits meetings ayants lieu sur les places de villages et quartiers ou au bord des routes, ainsi que des véhicules munis d'enceintes propageant le message des partis et de la musique assourdissante. En l'absence de sondages, impossible de prédire l'issue du scrutin, nous en saurons plus la semaine prochaine.